“Les commerciaux sont-ils vraiment pénibles à manager ? ”

4 septembre 2025

La rumeur est tenace : les commerciaux seraient difficiles à encadrer. Indisciplinés, individualistes, gestion du temps catastrophique et toujours une bonne réponse pour masquer ou atténuer leurs manquement… Bref, « pénibles ». C’est un cliché que l’on retrouve souvent dans les couloirs des entreprises. Mais qu’en est-il vraiment ?

Avec près de 30 ans d’expérience à former, accompagner et encadrer des équipes commerciales, j’ai appris à faire la part des choses et la réalité est plus nuancée.

Le métier de commercial est directement exposé à la pression des résultats. Objectifs mensuels, concurrence, clients exigeants… Rien d’étonnant à ce que certains adoptent des comportements plus tendus que d’autres. Ce n’est pas tant une question de personnalité « difficile » qu’une conséquence de l’environnement dans lequel nous évoluons. Les profils commerciaux sont généralement tournés vers l’extérieur de l’entreprise et « l’administratif » fait rarement partie de nos passions. Alors quand les process s’alourdissent, que les outils digitaux s’additionnent et s’empilent, les frustrations montent et les tensions apparaissent avec le management.

Toutes les études convergent : les commerciaux orientés long terme, centrés sur le client, sont plus faciles à manager. Ceux qui privilégient l’opportunité immédiate peuvent obtenir de bons résultats, mais avec des comportements parfois opportunistes. Cela rend le management plus difficile, surtout lorsque l’organisation mélange les profils. Dans cette situation particulière, l’équipe de chasse et l’équipe relation client n’ont évidemment pas les mêmes attentes et il faudrait que l’entreprise se paye le luxe d’avoir un manager pour chacune d’elles. Et ce n’est que rarement le cas !

En 2019, Harry Datwani (Deloitte Digital) rappelait que les entreprises ont beaucoup investi dans l’expérience client… mais très peu dans l’expérience commerciale interne. Selon lui, les organisations devraient développer des politiques seller-centric, comme elles ont su le faire avec le customer-centric. L’idée : simplifier la vie des vendeurs, fluidifier les process, mieux les outiller. En 2025, les recherches montrent que cette belle idée est restée dans « les boites », comme disent nos amis Québécois : peu d’entreprises ont vraiment repensé leur modèle en ce sens.

Alors les commerciaux sont pénibles à manager… ou ce sont les conditions dans lesquelles ils travaillent qui rendent leur management plus difficile.

Bien sûr, il y a des tempéraments plus indépendants, parfois réfractaires à certaines règles. C’est la rançon d’un métier où l’autonomie est une qualité clé. On le sait tous notre valeur ajoutée est face au client, alors tout ce qui nous en éloigne nous irrite un peu ! L’itinérance et la distance rajoutent à la difficulté à la relation.

Et puis l’essence du métier est de gérer un ascenseur émotionnel quasi permanent !  Alors oui, faut pas appeler un commercial, qui vient de perdre une affaire, pour lui demander pourquoi sur le devis de Mr Thibaut, sur la ligne 12, y’ a pas marqué « en stock » !

Ce qui fait la différence, c’est la capacité de l’entreprise et du management à offrir un cadre clair, des outils efficaces et un accompagnement fluide. Et quand ces conditions sont réunies, manager une équipe commerciale n’est pas une lutte permanente, plutôt une aventure stimulante où chacun progresse avec un objectif commun : créer de la valeur pour les clients.